Cinq petites années. C’est tout ce qu’il a fallu pour que The Smiths fassent leur place au panthéon de la pop britannique. Entre sa formation à Manchester en 1982 et sa séparation en 1987, le groupe a redonné vie à la pop à guitares, de moins en moins présente en Angleterre, devenant au passage l’objet d’un véritable culte. Derrière cette fulgurante carrière se trouve un des tandems créatifs les plus fascinants de l’histoire du rock. Au micro, Morrissey, disciple d’Oscar Wilde, spécialiste de la citation littéraire et parfaite incarnation de l’esprit britannique. Sa plume acide, tantôt cynique, tantôt romantique, en fera le héros des mésadapté·es et misanthropes du monde entier. À ses côtés, Johnny Marr, guitariste discret mais puissant, capable d’évoquer une multitude d’instruments avec les six cordes de sa Rickenbacker. Du tintement nerveux de « This Charming Man » à la slide lancinante de « How Soon is Now? », il illumine chaque pièce d’une couleur distincte, épaulé par la solide section rythmique formée du bassiste Andy Rourke et du batteur Mike Joyce. Les Smiths atteignent leur apex en 1986 avec The Queen Is Dead, qui cultive les extrêmes, passant de la rageuse charge antimonarchique de la pièce titre au romantisme éploré d’« I Know It’s Over ».Quand le groupe enregistre son chant du cygne, Strangeways, Here We Come, en 1987, la tension entre Marr et Morrissey connaît son paroxysme, menant à une rupture définitive. Alors que Marr entame une carrière de producteur et accumule les collaborations (Electronic, The The, Modest Mouse), Morrissey se lance dans un riche parcours solo ravissant les fans de la première heure, qui espèrent toujours une réunion.